La nuit était déjà tombée depuis un moment lorsque Elisa arriva dans le centre. Il n’était pourtant pas si tard, mais les jours avaient déjà bien raccourcis et la toison argentée brillait déjà dans le ciel noir, un ciel bien dégagé pour cette fin novembre. Alors qu’elle avançait à pas feutrés comme un félin prêt à bondir sur sa proie, la jeune femme regardait autour d’elle. La rouquine n’avait pas spécialement peur de tomber sur quelqu’un simplement elle se méfiait des quartiers qu’elle connaissait peu et celui là en faisait partie même si elle était déjà venue voir sa sœur une ou deux fois chez elle. Elle n’avait pas non plus particulièrement envie de croiser quelqu’un qui dans la solitude de la nuit voudrait lui taper la discute. Non vraiment, elle avait d’autres projets comme voir sa sœur dont elle n’avait pas eu de nouvelles depuis l’arrivée du typhon et qu’elle avait bien cru perdre. Finalement il n’en était rien, elles étaient toujours bien vivantes. Aurélie avait d’ailleurs paru surprise de voir sa frangine encore en vie, et oui...toujours dans ses pattes.

La cadette De Costemore soupira, elle aurait tellement aimé être plus proche de sa sœur, que ce soit différent. Qu’elle n’ait pas l’impression permanente de la déranger. Ce n’était pas nouveau au fond. Bon, si elle l’avait invitée ce soir, c’était bien qu’elle voulait la voir non ? Elisa partit du principe que oui, sinon quel intérêt ? Elle ne savait pas encore comment allait se dérouler cette soirée, ni ce qu’Aurélie avait prévu. Est-ce qu’elles allaient encore se disputer ? La jeune femme se mordit la lèvre inférieure, espérant qu’au contraire la soirée se passerait bien et qu’elle pourrait, pour une fois, partager un vrai moment entre sœurs, comme elle en avait toujours rêvé.

Elle ne tarda plus à arriver chez Aurélie et sans frapper la jeune femme entra chez son aînée qui l’accueillit comme si cela faisait des heures qu’elle l’attendait. Sa sœur referma la porte derrière elle avant de l’enlacer, se fichant d’elle en lui disant qu’elle était contente de voir qu’elle se s’était pas perdue et qu’elle s’était souvenue du chemin. Elle lui offrit même de repartir avec une bouteille si elle était passée par les toits avant de lui mettre une pichenette sur la joue. Puis sans plus de cérémonie elle alla s’asseoir en face d’elle, terminant de l’accueillir avec un clin d’oeil et une boutade sur son physique.

Elisa leva les yeux au ciel lorsque sa soeur s’éloigna et passa une main dans ses cheveux pour les remettre en place, frottant sa joue au passage là où Aurélie lui avait mis la pichenette, pourquoi ne pouvait-elle pas simplement l’embrasser ?

“Bien sûr que j’ai retenu le chemin. Je traînais pas dans les rues pour rien je te rappelle. L’orientation ça me connait. Et non je suis pas passée par les toits, j’avais pas spécialement envie de me faire remarquer.”

Elle répondit à la dernière boutade son aînée en lâchant un grognement ou quelque chose qui y ressemblait. Elle regarda alors autour d’elle, elle était déjà venue mais c’était toujours étrange pour elle d’entrer dans l’antre de sa sœur, endroit qui lui était autrefois si souvent interdit même si le lieu n’était clairement plus le même et les circonstances non plus.

“Ça va, t’as pas l’air d’avoir eu trop de dégâts à cause du typhon. C’est une bonne chose. Je te l’ai déjà dit, mais je suis contente que tu n’ais rien. Je...”

Elle hésita un instant à continuer sa phrase mais compte tenu du fait qu’elle aurait pu perdre une seconde fois sa sœur durant les quelques jours interminables qu’avait duré le typhon, Elisa lâcha le morceau.

“Je me suis inquiétée pour toi.”