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Camelot

@Lazar Fresnel

Peu importe où se posait le regard de l’Alchimiste, il y avait toujours une trace témoignant du passage du typhon. Ca faisait quelques jours maintenant que le vent et la pluie avaient arrêté de s’abattre sur l’île, mais pourtant on aurait pu jurer que tout ceci était arrivé hier. Le quartier des alchimistes avait sans doute été le lieu qui avait le plus souffert du passage du typhon. Les cabanes perchées dans les arbres avaient pour la plupart perdu leur toit ou s’était en partie écrouler. L’habitation de Shanti n’avait pas été épargnée. Un pan entier du toit de sa cabane s’était envolé sous yeux l’obligeant à aller trouver refuge dans la bibliothèque des sages. Fort heureusement, l’Alchimiste ne possédait que très peu d’effets personnels. La seule chose qu’il avait véritablement perdue, c’était sa réserve personnelle d’alcool, son traitement contre ses pulsions monstrueuses de viol. Mais après quelques mésaventures, il avait fini par la reconstituer. Et il n’avait pas tardé à recommencer son auto médicamentions.

Debout devant ce qui devait être autrefois le toit d’une cabane, Shanti buvait. Il en avait besoin, il sentait qu’il était capable de perdre une nouvelle fois le combat contre ses pulsions s’il ne les noyait pas avant. Alors c’était ce qu’il faisait, une bouteille de gnôle vide gisait déjà à ses pieds. Son regard regardait dans le vide, Shanti ne pensait pas. Il essayait simplement d’oublier ce qui faisait de lui un monstre. Il ne voulait pas être cette créature abominable qui prenait le contrôle de son corps et qui l’obligeait à violer. L’espace d’un moment, il souhaitait n’être que Shanti ou n’être plus rien. Il n’en demandait pas plus à l’alcool. Oublier, c’était tout ce dont il avait besoin en ce moment.

Puis, soudain une brise glaciale transperça les vêtements fins de l’Alchimiste. Le typhon était peut-être fini, mais l’automne était toujours là et avec lui le froid mordant annonciateur de l’hiver à venir. Shanti attrapa alors une petite boîte d’allumettes qu’il conservait précieusement. C’était un bien rare sur l’île. Il aurait sans doute pu obtenir beaucoup de choses en échange, mais il ne pouvait pas s’en séparer. Le feu avait le don de l’apaiser et de gérer une véritable fascination chez lui. C’était exactement ce qu’il avait besoin en ce moment même. Alors doucement, il monta un petit abri en bois pour protéger les flammes du vent et il craqua une allumette. Les planches humides eurent du mal à s’embrasser, mais Shanti maîtrisait le feu depuis son enfance. Et ce n’était pas un peu d’alcool dans le sang qui allait l’empêcher de faire naître le réconfortant foyer.

Et au bout de quelques minutes, le pan de toit arraché s’était complètement embrasé. L’habitude avait fait que Shanti s’était placé dans le sens du vent, le protégeant ainsi des flammes. Un sourire enfantin, celui d’un gosse devant un magasin de friandise illuminait son visage. Ses yeux suivaient avec fascination les nuances des flammes. De temps, il versait quelques millilitres d’alcool dans le feu, riant en voyant l’effet que ça produisait. Il était comme un enfant avec un nouveau jouet. Il se rendait pas compte des dégâts que le feu pouvait causer sur son passage. Ça n’avait pas d’importance. Il avait chaud, il se sentait bien et surtout aucune pulsion ne tentait de prendre le contrôle. Plus rien ne comptait, il n’y avait plus Shanti, plus de monstre, seulement des flammes magnifiques et fascinantes.

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@Shanti Kapudia

Il est fatigué, Lazar. D'abord, et en premier lieu, il a faim ; si ce n'est pas une urgence absolue, il sent bien qu'il a perdu du poids ces derniers mois. Et comme si ça ne suffisait pas, comme si avoir la dalle n'était déjà pas suffisamment pénible au quotidien et réduisait de fait, drastiquement la consommation d'alcool, il a en plus fallu que le vent soufflant ces derniers jours devienne une implacable tempête balayant tout sur son passage. Si certains gangs ont peu souffert du typhon, il n'en est pas de même pour les Alchimistes. Les cabanes sont en ruines pour la plupart, et la sienne ne fait pas exception. Déjà fragilisée par le vent et la pluie, le typhon l'a presque réduite en charpie. Les travaux le fatiguent, l'énervent, et s'il a refusé l'aide proposée par les membres de son clan, c'est uniquement parce qu'il a estimé que les autres avaient déjà bien assez à faire avec la leur. Pendant la tempête, il s'est caché un peu comme il le pouvait sous le couvert des arbres, conscient que c'était tout sauf une bonne idée, mais où pouvait-il bien aller sinon là, hein ? Pas question de laisser son clan en plan par un temps pareil. Sauf que le résultat, il est là. Dormir dans sa petite maison perchée relève désormais bien plus de l'exploit que du strict minimum de confort qu'il avait réussi à obtenir en dix ans sur  l'île.

Alors forcément, il est énervé aujourd'hui. Alors qu'il marche dans la forêt à la recherche de matériel pour ses réparations, et en sachant qu'il avait déjà bien galéré à la construire, cette putain de cabane, et que de fait il risque d'avoir encore plus de mal à la réparer, il donne des coups de pieds dans les débris qu'il trouve sur son chemin. Ses vêtements sont froids, trempés, il grelotte, il donnerait tout pour un joint ou un verre mais là, il faut penser au plus important, hein ? A savoir, sauver leur putain de campement, ça serait une foutrement bonne idée, songe-t-il en grommelant, les mains dans ses poches  humides. Il y a tout un pan de mur à refaire chez lui et une grosse partie du toit s'est effondré sur son lit. En somme, il dort par terre depuis quelques jours, et ça, c'est intolérable.

Intolérable, un peu comme l'épaisse fumée qu'il voit s'élever un peu plus loin, dégageant  une abominable odeur de bois brûlé qui lui pique aussitôt les narines, lui fait écarquiller les yeux. Bordel de merde. Un incendie en plus ? Il manquerait plus que ça, mais comment c'est possible ? Tout est trempé ici depuis le passage du typhon et les vents glacés n'aident pas du tout à sécher quoi que ce soit, et pourtant quelque chose est en train de cramer. Alors, il se précipite en courant vers la fumée, parce si quelque chose ou quelqu'un a décidé de faire brûler du bois dans le coin, beaucoup trop près des cabanes en ruines, alors il va falloir arrêter ça et prévenir les siens.

Sauf que. La silhouette qu'il reconnait, devant le brasier qu'était sans doute auparavant un morceau d'habitation, c'est justement un Alchimiste. Un Alchimiste inconscient apparemment, qui observe les flammes avec fascination, sourire aux lèvres, versant par moments de l'alcool au milieu du feu pour raviver les flammes mordantes menaçant déjà la forêt autour ; les yeux écarquillés, Lazar reconnait l'indien de la bande, Shanti, qui ne l'a pas encore vu. Il ne l'a jamais aimé, ce mec. Trop étrange, trop bizarre, trop en marge, Lazar a toujours préféré s'en tenir éloigné et de préférence, le tenir éloigné des choses importantes. La preuve, il suffit qu'on ait le dos tourné, hein ? Comme si ça  ne suffisait pas, cette putain de catastrophe, il faut en plus que cet imbécile décide d'en provoquer une autre. Furieux, il le rejoint en quelques pas, les sourcils froncés, la mâchoire serrée par la colère.

« Eh ! Eteins ça putain, t'es complètement con ou quoi ?! » gueule le jeune homme en rejoignant sa hauteur, les bras écartés pour désigner l'immense feu de joie qui lui chauffe les joues. « On est pas assez dans la merde pour toi c'est ça ? Mais qu'est-ce qui t'a pris bordel, on fait quoi si ça atteint les habitations ? Il y a du vent, merde ! » C'est pas possible. Il n'est pas chevalier pour faire la police, bordel.

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@Lazar Fresnel

Il se sentait si bien auprès ce feu dévorant. La douce chaleur venait réchauffer son corps frigorifié. L’odeur âcre du bois brûlé envahissait ses narines et le ramenait des années en arrière. Shanti avait l’impression d’être de nouveau l’enfant contemplant les flammes à qui il venait de donner naissance pour la première fois de son existence. L’Alchimiste ne se souciait pas de la direction que pouvait prendre le feu. Il regardait seulement les flammes dansées et grandir sous l’action de l’alcool et du bois craquant sous la chaleur. Cette vision l’apaisait et il aurait sans doute pu rester des heures ainsi à observer sa créature calorique grandir et tout dévorer sur son passage. Mais c’était sans compter l’intervention d’un homme.

Soudain, Shanti fut arraché à sa bulle. Lazar, un chevalier, enfin il n’en était pas très sûr et il n’en avait rien à faire de qui il était, vint lui crier dessus. L’Indien se tourna en direction de celui qui venait de l’extirper de ce moment de paix. Ses sourcils étaient froncés et le reste de son visage exprimait de l’incompréhension mêlée à une colère naissante. Son regard observa de bas en haut Lazar avant de lui répondre.

_ On n’éteint pas un feu. Toute la beauté est de le laisser vivre et mourir de lui-même. Expliqua-t-il avec beaucoup de sérieux.

Les flammes qui dévoraient le bois à quelques mètres des deux hommes étaient comme l’enfant de Shanti. Il n’était pas question de leur ôter la vie. Ce feu si réconfortant avait autant le droit de vivre que lui, si ce n’était pas plus. Il offrait une telle source de réconfort à son père, un sentiment de paix et de bien-être qu’il serait un sacrilège de l’étouffer.

_ Tu ne vois pas la beauté de ses flammes ? Regarde comme elles dansent vêtu de leur robe grise. Demanda Shanti avec réprobation.
Laisse les vivre et observe-les ! Elles sont magnifiques. Je n’ai rien vu de plus beau.

L’Alchimiste avait bien trop d’alcool dans son sang pour réaliser le danger que pouvait être le feu pour le reste des habitations et la forêt. Il était à l’abri, le vent poussait les flammes dans la direction opposée. C’était le plus important pour lui.

_ Je t’interdis de tenter de leur faire du mal ! Cria-t-il à Lazar.

Son esprit avait enfin saisi le véritable sens des mots du chevalier et il n’était pas question de la laisser faire. Avec Vassily, le feu était la seule chose qui lui procurait un véritable sentiment de bien-être. Shanti avait le droit de sentir bien, d’être heureux de temps en temps. Il avait beau être un monstre, il voulait croire qu’il pouvait quémander ses petits moments où ses pulsions se faisaient oublier et où il pouvait se laisser bercer par le craquement du bois et la douce chaleur des flammes.

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@Shanti Kapudia

Il est complètement inconscient du danger, le jeune homme dont les yeux sont incapables de se détacher des flammes, au départ. Un putain de pyromane, il ne manquait plus que ça ; après l’ouragan, la famine, il va falloir qu’ils trouvent un autre moyen de survivre sur l’île quand le campement entier des Alchimistes aura pris feu. C’est bien davantage l’angoisse que la rage qui motive les gestes de Lazar à l’encontre de Shanti, et en premier lieu celui de lui aboyer d’éteindre ces putains de flammes qui risquent de tous les mettre en danger. Il est sûrement îvre, il n’y a que ça comme raison, non ? Il fronce le nez, le chevalier, quand l’odeur de bois brûlé le prend à la gorge, menace de le faire tousser. Ce garçon, il ne l’aime pas, il ne l’a jamais aimé. Il a toujours trouvé que son regard cachait une étrange folie, et si ça n’avait tenu qu’à lui, il ne serait pas resté dans le gang. Malheureusement, ce n’est pas à lui de choisir seul, et il a fallu s’accommoder à certaines présences, notamment la sienne. Celle de Letizia aussi, ce genre de parasites susceptibles de mettre tout le monde en danger.

Et voilà qu’il le dévisage, le jeune homme ; ça n’a pas du tout l’air de lui plaire d’être repris comme un gamin, sauf que c’est un ordre, ce qu’il lui a donné. Il n’est pas chevalier, Shanti, juste un type qui a vu de la lumière et qui est entré, en somme. Alors il va falloir qu’il l’accepte et qu’il obéisse, parce que non content de mettre tout le monde en danger, il est en train de lui scier les nerfs. « On n’éteint pas un feu. Toute la beauté est de le laisser vivre et mourir de lui-même. » Sauf que quand on est un garçon intelligent, on allume pas un feu aussi grand à proximité des habitations, bordel. Non seulement il risque de faire brûler toute la forêt, mais les fumées pourraient asphyxier ceux qui sont encore en hauteur et qui tentent de réparer leurs cabanes. Est-ce qu’il est totalement inconscient, ou seulement complètement abruti ?

Et s’il est incapable d’ignorer le fait que la chaleur soit terriblement bienfaitrice après le froid qui les a tous envahis quand l’ouragan est arrivé. S’il n’était pas un peu conscient des dangers, Lazar apprécierait sans doute cet apport réconfortant, mais pas maintenant. Même si le feu sèche ses vêtements, il ne peut juste pas accepter que Shanti fasse n’importe quoi. « Tu ne vois pas la beauté de ses flammes ? Regarde comme elles dansent vêtu de leur robe grise. Laisse les vivre et observe-les ! Elles sont magnifiques. Je n’ai rien vu de plus beau. » De quoi il parle ? Qu’est-ce que c’est que ce putain de délire ? « T’es complètement malade... » gronde-t-il en sentant monter la colère, en plus de l’angoisse que ce feu génère parce qu’il est trop grand, et qu’il ignore s’il va pouvoir l’arrêter avec un malheureux seau d’eau. Ce qu’il faudrait, c’est une bonne pluie, et il n’arrive pas à croire qu’il soit en train de souhaiter ça après le putain de déluge qui leur est tombé dessus. « J’en ai rien à foutre de ton putain de baratin, okay ?! Eteins moi ce feu ou je te jure que ça va mal aller. »

Il devrait sans doute s’inquiéter un peu plus, Lazar. Parce que lorsque le jeune homme se tourne de nouveau vers lui, c’est avec une lueur noire dans les yeux, au moins aussi périlleuse que les flammes dont il parle avec autant de passion. Pour autant, il était loin d’appréhender le cri qui suit, furieux soudain, comme si ce mec était possédé par quelque chose d’incompréhensible, complètement taré. « Je t’interdis de tenter de leur faire du mal ! » Non, cette fois c’est trop. Il fronce les sourcils, lui aussi, et s’il faut répondre sur le même ton pour lui faire entendre raison, alors il le fera, aucun problème. Les membres frémissants de colère, Lazar l’invective, les yeux brillants autant d’angoisse que de colère. « T’es complètement con ou t’es sourd, abruti ?! Je te dis que c’est dangereux bordel, tu te rends compte de ce qui pourrait se passer si ça touchait les cabanes ?! Tu crois qu’on a le temps pour tes conneries, là, y’a pas assez de choses à faire ? » Il est odieux et il le sait, mais il n’a jamais eu l’habitude d’être aimable avec les gens qu’il n’aime pas, Lazar. De manière générale, ceux qui l’exéspèrent le savent très vite et là, ce n’est même plus ça à ce stade, c’est bien pire, il est hors de lui parce que ce mec est totalement inconscient, putain. « T’avais rien d’autre de plus intelligent à foutre ? Je sais pas moi, aider ton gang à réparer les dégâts, faire quelque chose de tes dix doigts, par exemple ! Au lieu de foutre tout le monde en danger parce qu’il te manque une case, éteins ça Shanti ou tu vas t’en prendre une. Tout de suite ! » Au besoin, il l’assommera et il s’en occupera lui même, mais qu’il le sache avant, quoi.

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@Lazar Fresnel

Les flammes brûlantes devant lui était une vision salvatrice. Le feu apaisait son esprit tel un tableau devant lequel on pouvait se perdre en contemplation. Shanti avait besoin de ça, il se sentait bien entouré par le feu, l’odeur du bois brûlé chatouillait ses narines, l’apaisant bien plus que le faisait l’alcool. Ses pulsions de viol avaient été dévorées par les flammes purificatrices Alors pourquoi est-ce que Lazar ne voulait pas le laisser tranquille ? Pourquoi il ne pouvait pas laisser le feu prendre et faire son travail ? Malade, Shanti l’était, il le savait que trop bien. Il avait pleinement conscience du monstre qu’il était, mais les flammes étaient pour lui un moyen de repousser cette affreuse créature qui prenait parfois le contrôle, très loin au fond de lui. Le feu était comme un sceau qui maintenait le monstre enfoui en lui. C’était si rare que Shanti puisse profiter de ce bien fait, alors pourquoi Lazar ne pouvait pas le laisser en profiter tranquillement. Si le Chevalier avait envie de rester là et de profiter du spectacle, Shanti serait ravi de partager ce moment. Mais ce n’était clairement pas les attentions de Lazar et ça attristait l’Indien autant que ça le mettait en colère. Ses yeux avaient perdu leur joie et s’assombrissaient de plus en plus.

_ J’ai besoin de ce feu ! Laisse les flammes danser ! Elles ne t’ont rien fait ! Cria-t-il, tel une mère tentant de protéger ses petits.

Il n’avait pas peur des menaces du chevalier. Il avait reçu des dizaines d’autres, si bien que ça n’avait plus grand effet sur lui. Certes, Shanti était loin d’être courageux. Mais à force d’être confronté à une peur, on finissait par devenir plus résistant ou ne simplement plus à y croire. Dans une autre situation, l’Alchimiste aurait sans doute prêté plus d’attention aux menaces de Lazar, mais c’était son feu bénéfique qui était en jeu, il ne pouvait pas abandonner. Alors, Shanti cria sur son interlocuteur, il était furieux et il le faisait savoir.

Mais Lazar ne se démonta pas. Il se mit lui aussi à parler sur le même ton qu’Uther. Ce dernier l’observa sans savoir quoi répondre. Il commençait à perdre son assurance. Il voulait protéger les flammes, mais l’Indien réalisait peu à peu le danger que pouvait être non le feu, mais la colère du chevalier pour lui. Ses mains se mirent à trembler de colère, mais aussi de peur. Cependant, le regard de Shanti se détourna de Lazar pour se plonger dans le foyer rassurant, cherchant de la force dans les crépitements du bois craquant sous la morsure du feu. Il avait besoin de courage il fallait que les flammes lui donne la force de les défendre. Seul, Shanti était trop lâche. Il ne pourrait pas tenir tête très longtemps au chevalier. Il était faible et il le savait. Pourquoi sinon aurait-il besoin de boire pour combattre ses pulsions, pourquoi cherchait-il le réconfort dans les flammes ?

_ Je fais ce que je veux ! Cria-t-il face aux flammes.

Serrant les points jusqu’à s’enfoncer les ongles dans ses paumes, faisant perler quelques gouttes de sang, Shanti se tourna en direction de Lazar. La peur était là, grandissant de plus en plus, mais il devait protéger son enfant et en échange le feu lui donnait la force de tenir tête au chevalier. Le regard de Shanti était toujours noir de colère, mais il ne se braquait plus sur le visage de Lazar, mais sur son torse.

_ Tu y connais rien... Dit-il plus doucement.
Le feu va vivre et mourir tout seul. C’est trop humide pour qu’il se propage… Quand il aura tout brûlé, les flammes rendront leur dernier souffle. Alors, laisse-les vivre tranquillement le peu qu’elles ont ! Termina Shanti avec un regain de courage, relevant quelques secondes ses yeux vers le visage du chevalier avant de les rabaisser sur le buste de ce dernier.

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@Shanti Kapudia

Lazar a toujours trouvé Shanti étrange, dangereux. C'est comme si le jeune homme avait une absence dans le regard, une profonde déconnexion avec la réalité ; pour quelqu'un d'aussi terre-à-terre que l'alchimiste, c'est totalement incompréhensible, impossible à déchiffrer. Il s'en est toujours tenu soigneusement éloigné, parce que si son gang est capable d'accepter tout le monde, ce n'est pas vraiment le cas du français. Il aurait aimé un système un peu plus élitiste, où les fous furieux dans son genre n'auraient pas eu leur  place. Parce que malgré la menace, Shanti reste campé sur ses positions, incapable de voir quel danger menace le campement de leur gang, les risques qu'il prend pour  le simple plaisir de s'abrutir devant les flammes dont la chaleur lui est totalement insupportable. Pire même ; il s'énerve. « J’ai besoin de ce feu ! Laisse les flammes danser ! Elles ne t’ont rien fait ! »

Besoin ? Mais pourquoi bordel, et s'il en a si besoin que  ça, pourquoi ne pas l'avoir fait plus loin, hein ? Que va-t-il se passer si la forêt prend feu, si les proies se cassent, s'ils n'ont plus aucun endroit où dormir ? Le vent a déjà fait des dégâts terrifiants dans les bois, certaines  habitations sont tellement endommagées que les alchimistes ont dû se débrouiller pour faire de la colocation provisoire, et s'il a eu de la chance de ne recevoir aucune visite impromptue, Lazar sait très bien que la nécessité première est de protéger le bien commun avant de faire des conneries de ce genre. Est-il donc le seul à voir le danger, à s'inquiéter un peu pour son gang ? La pensée l'énerve encore plus, et cette fois il sait très bien que si l'indien continue, il va vraiment prendre son poing dans la gueule. S'il faut l'assommer pour aller chercher de l'eau et éteindre tout ça, alors il le fera, et il n'hésitera pas. Cette hostilité est palpable dans l'air quand Lazar le dévisage, les dents et les poings serrés. « Je fais ce que je veux ! » Il ne le regarde même pas. C'est comme s'il avait fait des flammes ses alliées, il est fou. Complètement fou. Fou de rage, il crie en réponse, le petit français. « Non, justement, tu fais prendre des risques à tout le monde avec tes conneries ! »

L'invective a au moins pour effet de le faire se tourner ; deux yeux sombres rencontrent les siens, il ne baisse pas le regard, ni sa garde. C'est l'indien qui finit par baisser les yeux, parce qu'il a quand même un semblant d'autorité, Lazar, et il ne laissera personne lui marcher sur la gueule, surtout pas quand il est convaincu d'avoir raison. Plus les  minutes passent et plus il fout tout le monde en danger, putain. « Tu y connais rien... » Et qu'est-ce qu'il est supposé connaître ? Il est convaincu que le feu est trop près, mal orienté, qu'une bourrasque pourrait faire s'envoler des braises jusqu'à la forêt, ça il le sait. « Le feu va vivre et mourir tout seul. C’est trop humide pour qu’il se propage… Quand il aura tout brûlé, les flammes rendront leur dernier souffle. Alors, laisse-les vivre tranquillement le peu qu’elles ont ! » Il lève les yeux, très vite. Les baisse de nouveau. Il a peur. Toute la défiance du jeune homme semble s'être envolée à l'instant où la menace du poing s'est manifestée. Ça l'arrête, Lazar, parce qu'il ne se battra que si Shanti résiste, la violence et lui ça  n'a jamais été  une grande histoire d'amour. Exaspéré, il passe  une main sur son visage, souffle un grand coup. Peut-être qu'en lui expliquant calmement il va arriver à se faire entendre.

« Pour la dernière fois, t'es trop près de habitations. Un coup de vent pourrait enflammer n'importe quoi, et vu la force de ton putain de feu il pourrait mettre des heures à s'éteindre merde. » Plus calme, mais pas plus aimable pour autant, très loin de là. D'un geste du bras, il désigne la forêt, les éclats de voix qui résonnent, un peu plus loin. « T'es qu'un putain d'égoïste. Le gang a besoin de tout le monde pour réparer les dégâts et toi t'es là, à t'allumer un feu ? T'as pas l'impression qu'il y a un problème ? » Certains ont perdu leur maison bordel, sans parler des réserves de bouffe qui ont été totalement détruites, dispersées par l'ouragan. Ils sont mis à nu, c'est eux qui ont été les plus touchés, ils ont besoin de toute l'aide possible. « C'est comme ça que tu conçois ton gang ? J'en ai rien à faire de comprendre pourquoi t'es assez tordu pour prendre ce genre de décisions, mais tu vas quand même faire ce que je te dis, Shanti. On a besoin d'aide, pas de ton feu à la con. »

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Camelot

@Lazar Fresnel

Les flammes dansant à ses côtés offraient leur force à l’Indien, lui permettant de résister face à Lazar, de ne pas lui tourner le dos, de ne pas fuir devant ses menaces. La peur était présente, mais Shanti ne pouvait pas partir. C’était lui qui avait fait naître ce feu, il en était responsable au même titre qu’une vie. Il ne pouvait pas l’abandonner. Il était autant incapable de laisser un enfant qui serait le sien que de laisser les flammes, de les regarder se faire assassiner par Lazar.

La rage qu’était en train d’être déversée sur Shanti le terrorisait, mais il devait pour une fois faire preuve de courage. Il n’était pas le seul dans cette histoire, les flammes qui lui donnaient de la force étaient là. Elles n’avaient personne d’autre pour plaider en leur faveur que leur créateur. Alors, Shanti détourna son regard du feu pour le poser de nouveau sur le chevalier en face de lui. Les yeux sombres de l’Indien étaient bien posés sur Lazar, mais ils étaient incapables de venir défier les iris emplis de colère de ce dernier. Une étincelle de courage traversa Shanti quelques instants, juste le temps de commencer à défendre les flammes avant de disparaître. Il était de nouveau incapable de défier le regard de son interlocuteur.

Trop près des habitations ? Shanti savait très bien qu’il se trouvait non loin des cabanes. Après tout, c’était à ce qui avait dû être un toit qu’il avait mis le feu. Égoïste ? Il l’était très certainement et il n’allait pas le cacher. Il avait rejoint les alchimistes en premier lieu, parce que c’était le seul gang capable de lui offrir le médicament qu’il avait besoin pour lutter contre ses pulsions, l’alcool. Les années avaient passé depuis que Shanti avait rejoint les alchimistes, mais les choses n’avaient pas changé. Lorsque l’Indien avait été en piteuse état, amoché, presque battu à mort par un inconnu, aucun alchimiste ne l’avait aidé. C’était un sage qui l’avait recueilli, offert du réconfort et un abri pour la nuit. Son gang, Shanti le voyait juste comme un lieu de résidence, une ville dortoir,  où en échange de quelques services par-ci, par-là, il pouvait obtenir de quoi manger et de quoi boire. C’était tout. Il n’avait jamais eu de véritable affinité avec les alchimistes et il ne cherchait pas à en avoir. Alors que la cabane déjà détruite par le typhon d’un mec à qui il n’avait jamais adressé la parole brûle, ne lui faisait rien, mis à part lui apporter le réconfort des flammes.

_ Un problème ? Tout le monde ici n’en a rien à faire de moi, pourquoi est-ce que je m’intéressais à eux ?! Cracha Shanti, relevant le nez vers Lazar.
Les alchimistes sont un gang d’égoïstes, alors pourquoi je n’aurais pas le droit d’en être un moi aussi ?

Le chevalier pouvait dire autant fois qu’il le voulait que Shanti était tordu ou même pire. Ce dernier ne réagirait pas. Il avait parfaitement conscience de ses démons, du monstre qu’il était. Il était même le premier à se qualifier de cette manière, alors ce n’étaient pas des mots prononcés par un homme qui ne le connaissait qui allaient pouvoir lui faire du mal. Il allait encore moins lui obéir. Tout ce qu’il avait toujours demandé aux alchimistes était qu’on le laisse faire sa vie, il ne se mêlait pas à la vie du gang, si ce n’était quelques fêtes de temps, mais rien de plus. Alors reconnaître l’autorité des chevaliers, surtout après avoir menacé de détruire les flammes, ça ne risquait pas d’arriver.

_ Besoin de mon aide ? Quand est-ce que les autres ont été là pour moi ? Lors du typhon, j’ai dû me débrouiller sans vous pour me trouver un abri, lorsque j’ai été battu un mort, c’est un sage qui m’a aidé… Alors pourquoi est-ce que je devrais les aider ?

Shanti n’était toujours pas rassuré par la présence de Lazar, mais la présence des flammes et la mention de Vassily l’aidaient à se calmer et à trouver un peu de courage de faire face au chevalier. Finalement, l’Indien délaissa son interlocuteur pour venir s’asseoir devant les flammes, laissant son regard se perdre au milieu de leur danse sensuelle.

_ Fous moi la paix, c’est tout ce que je demande… Dit-il tout bas, n’osant pas le dire plus fort.

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Camelot

@Shanti Kapudia

« Un problème ? Tout le monde ici n’en a rien à faire de moi, pourquoi est-ce que je m’intéressais à eux ?! » Qu’est-ce qu’il raconte, le villageois ? Si lui a toujours été distant vis-à-vis de Shanti, c’était sans doute pour les mêmes raisons que les autres. Et quand bien même ce serait le cas, quel genre d’égoïsme pousse l’indien à se comporter comme ça ? Lui aussi a parfois eu besoin de son gang sans le trouver, mais il sait que des gens fidèles sont encore capables de s’entraider pour le bien-être de tous. En tout cas, ils n’allument pas des feu à deux pas des maisons, eux, ce ne sont pas des énormes tarés, eux. Alors bon, qu’ils restent à l’écart d’une bizarrerie ambulante comme ce mec, ça n’a absolument rien d’étonnant. Lui non plus, il ne s’amuse pas à s’y frotter sauf quand il n’a pas le choix. Et là il ne l’a pas, il est obligé de soutenir se regard furieux et surtout, de se retenir d’envoyer un coup de poing sur son visage à ce glorieux imbécile, parce que son insolence est insupportable au même titre que son inconscience. « Les alchimistes sont un gang d’égoïstes, alors pourquoi je n’aurais pas le droit d’en être un moi aussi ? »

Il a faux, sur toute la ligne. Les magiciens sont égoïstes. Les Sages s’entendent bien, mais enlevez la weed et la cohésion de groupe disparaît. Les Chimères ont des liens forts, mais ça n’a rien à voir avec les alchimistes. Lazar l’a créé, ce gang, il sait assez bien de quoi il parle ; quand Nicky, Deklan et Marcelo ont voulu le fonder, ils se sont d’abord tous mis d’accord pour dire qu’ils mettraient la main sur le marché de l’alcool. C’était ça l’idée, et quand les autres sont arrivés, ce germe est devenu une famille. Chaque alchimiste protège son gang au détriment de son propre profit, et ceux qui sont incapables de le voir finissent comme ce garçon dont les yeux sont rivés vers les flammes sans la moindre intention de les éteindre. Mais il va falloir qu’il comprenne qu’il n’est pas dépositaire de ce choix. « Besoin de mon aide ? Quand est-ce que les autres ont été là pour moi ? Lors du typhon, j’ai dû me débrouiller sans vous pour me trouver un abri, lorsque j’ai été battu à mort, c’est un sage qui m’a aidé… Alors pourquoi est-ce que je devrais les aider ? » Mais quel culot putain. Et il fallait lui trouver à manger aussi ? Le border le soir ? La famille  a ses limites, il n’y a pas de portable ici pas de moyens de contacter qui que ce soit en cas de problème. Il aurait déchanté à l’époque, s’il était arrivé dans les premiers Shanti aurait très vite constaté ce que c’était que l’égoïsme, le vrai. A l’époque, si Bella n’avait pas été là, nul doute que les choses se seraient déroulées autrement pour lui.

Alors quand le garçon s’installe presque tranquillement face au feu, défiant le jeune homme d’essayer même de le convaincre d’éteindre son feu à la con, Lazar fronce les sourcils. Son air de victime et l’évidente faiblesse du garçon ne sont pas suffisants à ses yeux pour lui donner la moindre pitié. Il a essayé de lui dire de plusieurs manières, maintenant ça commence à bien faire. « Fous moi la paix, c’est tout ce que je demande… » « Tu commences à me gonfler, Kapudia. » Très bien. Il ne veut pas lui obéir ? Soit, il va l’éteindre lui-même son putain de feu. « Tu voudrais quoi, que j’te plaigne ? T’as fait quoi exactement pour le gang depuis que t’es arrivé ? Quand on essaie pas de s’investir on récolte que ce qu’on sème. Viens pas chialer si les autres t’accordent pas l’attention que t’es supposé mériter si tu fais pas la même chose de ton côté. » Il le toise, méprisant. De toute façon c’est simple, il va se barrer et revenir avec deux seaux d’eau. « Si c’est un Sage qui t’a aidé alors t’attends quoi pour les rejoindre ? Ils te laisseront peut-être faire tranquillement tes petits feux de joie à côté de leurs plans, j’suis sûr que ça leur plaira. Putain de tocard. » Il recule. Cette fois il en a marre. Il n’a pas de temps à perdre avec un imbécile quand les autres ont besoin de lui, ça va bien. « Tu sais quoi ? Bouge pas, j’vais l’éteindre moi-même ton feu. Essaie juste de m’en empêcher, qu’on rigole. » Et voilà qu’il fait demi-tour, l’Alchimiste ; direction la base du gang, il doit y avoir des contenants suffisamment grands pour étouffer au moins un peu ce putain de bûcher.

Sweet fire
Camelot

@Lazar Fresnel

Shanti avait peur, mais ce n’était pas pour lui. C’était bien pour le feu qu’il avait vu naître. Pour lui, c’était l’évidence même qu’il devait protéger le foyer, c’était pour ça qu’il ne comprenait comment Lazar pouvait avoir autant envie de le tuer. Ce n’était pas l’argument du gang qui allait changer quelque chose. Shanti n’avait aucune attache à son gang, il en faisait partie car il avait besoin d’alcool. Jamais il ne s’était vraiment senti à sa place dans ce groupe. A son arrivée, il avait eu l’étrange sensation que tout le monde le regardait de travers, comme s’il était tous au courant des crimes qu’il avait commis. Ce regard avait été lourd à supporter jusqu’à ce que Shanti s’en détache, arrête d’accorder la moindre importance à son gang. Alors pourquoi eest-ce que maintenant il accorderait le moindre intérêt à des personnes qui lui avaient fait comprendre qu’il n’était pas le bienvenu ? Pour la plupart, Shanti ne connaissait d’eux que leur visage et parfois leur prénom, il ne savait rien de plus sur eux et il s’en portait très bien. Qu’ils brûlent lui était bien égal. Ça ne lui apporterait sans doute aucun réconfort, mais il n’en serait pas attristé pour autant. Tout ce qu’il demandait c’était de pouvoir profiter en paix des flammes réconfortantes. Il y avait si peu de choses qui réussissaient à le faire se sentir bien, Lazar pouvait bien lui laisser apprécier ce rare moment de plénitude.

Shanti n’osa pas tourner la tête en direction du chevalier. Il préférait se concentrer sur le feu dansant devant lui. Se faire plaindre ? Loin de lui l’idée, s’il avait vraiment voulu que Lazar le prenne en pitié, il lui aurait parlé du monstre qu’il avait en lui, des pulsions de viol qu’il peinait à contrôler. Non, tout ce que Shanti avait fait était d’exposer ce qui pour lui semblait être des faits.

La remarque sur rejoindre les sages fit réagir Shanti. Il tourna la tête en direction de Lazar. Il n’y avait jamais vraiment pensé. Non, il ne pouvait pas. Jamais Vassily ne l’acceptera lorsqu’il aurait pris connaissance du monstre qu’était l’indien. Et sans Vassilly, le gang des sages ne serait qu’un remplacement de celui des alchimistes, aussi vide et sans intérêt. Peut-être les drogues seront plus efficaces que l’alcool ? Shanti en doutait.

Soudain, les mots de Lazar commencèrent à vraiment effrayer l’Indien. Il allait éteindre les flammes. Non, il ne pouvait pas. Elles méritaient autant si ce n’était plus de vivre que le chevalier et certainement beaucoup plus que Shanti.

_ Non ! Laisse le feu tranquille ! Cria-t-il.

Une lueur folle dans les yeux, il se releva et attrapa une pierre. S’il avait eu le courage, Shanti se serait lancé sur Lazar pour se battre avec lui à mains nues, mais tout ce qu’il avait c’était sa lâcheté. Alors, il serra ferrement la pierre entre ses doigts avant de la lancer avec force en direction de Lazar, espérant le toucher, peut-être même l’assommer. Mais Shanti était saoul et il n’avait jamais été doué pour viser. La pierre risquait simplement de toucher le dos du chevalier ou de lui passer à côté. Alors, au cas où, l’Indien attrapa une deuxième pierre, prêt à refaire un lancer.